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25/04/2015

Le THKP-C et le kémalisme

"Bref historique du DHKP-C par lui-même", août 2004 :

"Les circonstances de la naissance du THKP-C

A partir de 1946, l’impérialisme US opère une reconquête néo-coloniale de la Turquie dans le cadre de la doctrine Truman et du Plan Marshall, à travers les relations qu’il développe avec la nouvelle bourgeoisie turque. Etant encore embryonnaire et donc incapable d’imposer son pouvoir politique, cette bourgeoisie s’allie aux seigneurs fonciers, aux commerçants et aux usuriers pour former une oligarchie.

Le 27 mai 1960, des officiers anti-impérialistes fidèles aux principes de Kemal Atatürk, le fondateur nationaliste de la république de Turquie, mènent un coup d’état, appuyée par la classe ouvrière, les étudiants, les intellectuels et l’opposition démocratique, exécutent les dirigeants du parti pro-yankee, le DP, et font voter en 1961 une nouvelle Constitution, qui est de loin la plus démocratique que la Turquie ait connue. Les droits politiques et syndicaux sont désormais respectés, les banques et les grandes entreprises sont nationalisées, l’autonomie est accordée aux universités, la censure est abolie. Conséquence : une quantité incalculable d’ouvrages marxistes sont traduits, ce qui contribue à l’éducation politique de la classe ouvrière et de la jeunesse et à l’émergence d’une nouvelle génération révolutionnaire.

En 1961, le Parti ouvrier de Turquie (TIP) voit le jour. En 1965, ce parti fonde dans les universités la Fédération des clubs de réflexion (FKF). L’un des dirigeants de la fédération, Mahir Cayan, futur dirigeant du THKP-C, travaille à la radicalisation de la lutte populaire et à la fusion entre la classe ouvrière et les étudiants."

07/07/2014

Nikita Khrouchtchev et la Turquie

Victor Segesvary, Le réalisme khrouchtchévien, Neuchâtel, La Baconnière, 1968, p. 17-18 :

"Après la mort de Staline, Molotov, devenu ministre des Affaires étrangères du gouvernement Malenkov, s'emploie immédiatement à améliorer les relations soviéto-turques. Il envoie une note à la Turquie le 30 mai 1953, désavouant — dans une démarche sans précédent dans la pratique diplomatique soviétique — le programme d'expansion territoriale de Staline. Par cette note il informe le gouvernement turc que l'URSS a l'intention de tourner définitivement la page sur les inimitiés précédentes entre les deux pays et qu'elle prendra un nouveau départ. Il déclare au nom de la Géorgie et de l'Arménie soviétiques — pour le compte desquelles le programme d'expansion territoriale avait été lancé — qu'elles renoncent à leurs prétentions, et que l'URSS n'a pas la moindre revendication territoriale sur la Turquie. Naturellement Molotov ne peut et ne veut pas céder sur tous les points. Aussi ne souscrit-il pas dans sa note au statu quo dans la mer Noire et dans les Détroits, basé sur la Convention de Montreux, mais il fait allusion, en termes vagues, à un arrangement dont les conditions seraient acceptables tant pour l'URSS que pour la Turquie. En effet, la note soviétique propose à la Turquie un traité bilatéral sur toutes les questions controversées, écartant par cet arrangement les cosignataires de la Convention de Montreux ; c'est, en somme, une alliance antioccidentale. Cette action n'a pas été couronnée de succès. La réponse turque a été froide et réservée. Elle enregistrait avec satisfaction l'annulation des revendications territoriales, mais déclarait que la question des Détroits avait déjà été réglée par la Convention de Montreux.

Cette initiative de Molotov prouve que les demi-mesures ne servent à rien ; un revirement soviétique au Proche-Orient ne pouvait s'accomplir que sur de nouvelles bases. « C'est Staline qui avait corrompu les relations de l'Union Soviétique avec l'Iran et la Turquie », déclare Boulganine au printemps 1955 et il donne l'assurance que l'intention des nouveaux dirigeants soviétiques n'est autre que de « retourner à la politique léniniste du respect fondamental de la souveraineté des autres pays ». A la fin de la même année, Khrouchtchev s'adressant au Soviet Suprême, reconnaît publiquement les torts de l'URSS envers la Turquie : « Nous ne pouvions pas dire qu'en ce qui concerne la détérioration de nos relations, la faute incombe entièrement à la Turquie ; nous avons fait de notre côté des déclarations peu appropriées qui ont contribué à assombrir ces relations »."

Jean-Baptiste Duroselle et ‎Jean Meyriat (dir.), Les nouveaux Etats dans les relations internationales, Paris, Armand Colin, 1962, p. 39 :

"Cette position de soutien de toute manifestation anti-impérialiste apparaît nettement dans la manière dont l'U.R.S.S. a accueilli en 1959-60 les événements de Turquie. Il a suffit d'une prudente allusion du nouveau ministre des affaires étrangères, S. Sarper, à une politique étrangère turque inchangée, mais où « certaines nuances » seraient apportées, l'accent étant mis sur l'indépendance et la souveraineté du pays, pour que Moscou montrât sa satisfaction. Le jour même où il lisait cette nouvelle dans la Pravda, M. Khrouchtchev disait en effet : « Les Turcs, chez qui se trouvent des bases américaines, ont arrêté Menderes, et il est maintenant en prison ; le nouveau premier ministre, le général Gürsel, a déclaré qu'il suivrait la politique d'Atatürk, avec qui, alors que Lénine était encore en vie, notre pays a eu de bonnes relations. Nous voudrions qu'il y ait de l'amitié entre nous et la Turquie, entre nous et l'Angleterre, entre nous et la France et les autres pays... » "

15/11/2013

Samir Amin et le développement de la Turquie kémaliste

Samir Amin, Itinéraire intellectuel. Regards sur le demi-siècle 1945-90, Paris, L'Harmattan, 1993, p. 115-116 :

"En Asie occidentale les circonstances - la pression de l'URSS - avaient fait de la Turquie un allié inconditionnel des Etats-Unis. Il reste que Washington n'a jamais renoncé à profiter de sa présence pour liquider le kémalisme - l'ancêtre avec trente ans d'avance du nassérisme et du projet de Bandoung. Revenu deux fois au pouvoir, en 1961 lorsque le général Gursel met un terme au régime compradore de Menderes, puis en 1980, le kémalisme, épuisé depuis longtemps, n'a jamais été capable ni de se dépasser lui-même, ni de laisser la place à un mouvement démocratique et populaire capable potentiellement de le faire. Son dérapage dans la direction du chauvinisme en 1983 (l'affaire de Chypre) s'explique peut-être par cet échec. Obnubilée par sa candidature à l'adhésion à la CEE, toujours refusée par Bruxelles, la Turquie a néanmoins à son actif un développement industriel compétitif qui la range dans le peloton de tête du tiers-monde nouveau. L'effondrement de l'URSS et la nouvelle donne au Moyen-Orient vont-ils mettre cette puissance au service d'un expansionnisme tournant délibérément le dos à l'Europe, ranimant un "néo-ottomanisme" ou un "néo-pantouranisme" ?"

Samir Amin, L'ethnie à l'assaut des nations : Yougoslavie, Ethiopie, Paris, L'Harmattan, 1994, p. 69-70 :

"Aujourd'hui, l'Asie centrale ex-soviétique constitue, avec la Turquie, la seule région du monde islamique sortie de la misère abjecte et de l'inefficacité totale de ses systèmes d'organisation et de production. Elle le doit au pouvoir soviétique."